La fin de NDDL? Prévisible mais pas la fin des ambitions économiques

Faut-il faire une croix sur l’aéroport de Notre-Dame des Landes? Tout le monde semble le croire. Après plus de 50 ans de combats diverses entre opposants et partisans d’un nouvel aéroport à Nantes, le projet semble être en passe de disparaître des radars. A tel point que le Mensuel de Rennes de ce mois-ci y consacre sa Une, posant la question du «plan B», pour sortir de l’impasse.

Il faut faire face à une réalité, le soutien à l’aéroport de Notre-Dame des Landes s’est construit sur un fantasme. L’idée que ce nouvel aéroport de «l’Ouest» pourrait être un petit Roissy. Voire même ce troisième aéroport parisien qui revient sans cesse comme un serpent de mer depuis une bonne vingtaine d’années. Au départ de Nantes, le monde devait s’ouvrir aux habitants du grand ouest, de Caen à La Rochelle. Et bien entendu les Bretons devaient en être les premiers bénéficiaires.

Imaginez, des liaisons au moins hebdomadaires vers New-York, Singapour ou Shanghai. Autant de destinations à même de faire de la capitale historique de la Bretagne une ville qui compte en Europe, une vraie métropole, au-delà du simple mot et des pouvoirs récemment accordés par la première phase de la réforme territoriale. Un point visible sur la carte du monde.

Et que d’opportunités économiques pour les entreprises des régions concernées. Le monde économique est d’ailleurs celui qui a le plus soutenu le projet d’aéroport. Parfois en allant jusqu’au chantage, comme Louis Le Duff, PDG du groupe éponyme, propriétaire des franchises telles que la Brioche Dorée ou Pizza del Arte, menaçant de faire partir son siège social vers Paris si l’aéroport ne se construisait pas. Comment ne pas comprendre tous ces chefs d’entreprises, qui se voyaient enfin accéder directement aux marchés émergents, demain la Chine, ensuite l’Inde ou le Brésil, depuis le pas de leur porte quasiment.

Sauf que de liaisons continentales supplémentaires, il n’en a jamais été question du côté des compagnies aériennes. Et les promoteurs du projet s’étaient passablement enflammés. Aucune nouvelle compagnie ne s’est jamais engagée à s’installer à Nantes en cas de nouvel aéroport, aucune compagnie présente n’a envisagé de mettre en place des liaisons vers les plus grandes villes du monde. Il s’agissait soit d’un rêve pour les défenseurs du projet, qui se disaient que le nouvel aéroport serait capable d’attirer, soit tout simplement d’un mensonge, visant à récolter de nouveaux soutiens.

D’une part parce que le troisième aéroport parisien existe. Il s’agit de Beauvais. A une heure de route de Paris, l’infrastructure profite à plein de sa proximité avec la capitale française mais également de la volonté de Ryan Air, et dans une moindre mesure Wizz Air, d’en faire son hub parisien. Résultat, Beauvais dépasse désormais Nantes en terme de trafic passagers. Si sa croissance semble se ralentir, ce qui pourrait permettre à Nantes de repasser devant en 2014, il présente malgré tout un certain nombre d’avantages, en particulier géographique, qui laissent à penser qu’il est le plus à même de profiter d’une hausse du trafic à moyen terme, qui fera de lui une alternative légitime à la surexploitation de Charles de Gaulle.

D’autre part parce que le principal marché pour les compagnies aériennes, hors Paris, n’est pas dans le grand ouest. La Côte d’Azur, et l’aéroport de Nice, le Rhône-Alpes (plus encore dans sa future configuration) avec celui de Lyon ou même l’Aquitaine sont des régions plus à même de justifier des liaisons transcontinentales.

Lyon en particulier, présente toutes les caractéristiques nécessaires : une ville très dynamique économiquement parlant, située dans un grand bassin de population, avec plusieurs villes importantes non loin (Grenoble, Saint-Etienne et même Clermont-Ferrand), une vraie métropole à dimension européenne d’ores et déjà. Pourtant, l’aéroport de Saint-Exupéry ne propose que quatre destinations hors Europe-Afrique, et aucune autre n’est programmée à court ou moyen terme.

La prolongation de la ligne grande vitesse enfin, hypothéquait les possibilités de développement ultérieures de Notre-Dame des Landes. Car pour une partie de la côte nord de la Bretagne par exemple, il sera bientôt presque aussi rapide de se rendre à Roissy que d’aller jusque Nantes. Dès lors pourquoi ne pas aller directement là où le monde entier s’offre aux passagers? L’arrivée de la ligne grande vitesse était la mort assurée du projet de nouvel aéroport de Nantes.

D’autres raisons existent bien entendu, mais le simple fait que l’un des principaux arguments en faveur d’un nouvel aéroport ne tienne plus la route a suffi à mettre fin aux rêves de ses partisans. Dans un contexte budgétaire toujours plus difficile pour l’Etat, ce dernier ne peut être qu’heureux de voir un projet coûteux disparaître de sa liste. Et si l’ancien Premier ministre soutenait l’idée de toute ses forces, l’actuel ne demande qu’à s’en débarrasser au plus vite.

Cela signifie-t-il pour autant que l’ouest, et tout particulièrement la Bretagne, est voué à rester à la remorque des grandes capitales européennes, en particulier Paris, Londres ou Madrid, pour ses futures liaisons transcontinentales? Pas nécessairement. Il est difficile de préjuger de l’avenir, dans un contexte de crise chronique du transport aérien malgré la progression constante du nombre de passagers transportés, tout du moins pour l’instant. Il n’en reste pas moins que des solutions innovantes peuvent permettre de pousser à plein les infrastructures existantes afin d’en tirer le meilleur partie possible et, pourquoi pas, un jour, voir un New York-Nantes ou Rennes-Hong Kong.

Il semblerait que ce soit d’ailleurs vers cette complémentarité entre les deux aéroports que pourrait s’orienter Vinci, qui opère à Nantes comme à Rennes. Après avoir laissé l’aéroport rennais quelque peu en sommeil dans le but de pousser celui de Nantes, et donc justifier l’intérêt de Notre-Dame des Landes, dont il allait assurer les travaux, Vinci semble se résoudre à proposer de nouvelles destinations au départ de Rennes. Car il est évident qu’une meilleure complémentarité entre les deux aéroports, distants d’une petite centaine de kilomètres, est la solution, plus encore si la liaison ferroviaire entre les deux infrastructures s’améliore.

Une solution que tente d’ailleurs de développer le groupe Air France-KLM qui rêve depuis plusieurs années d’un double hub Roissy-Amsterdam, avec liaison ferroviaire incluse. Si arriver de Rio à Paris pour récupérer son vol vers Séoul à Amsterdam est envisageable, malgré les deux heures de train que cela implique, il est évident qu’envisager cette solution avec Rennes et Nantes, doublement profitable pour les deux villes, est non seulement loin d’être aberrant mais en plus une solution intéressante pour laisser Notre-Dame des Landes mourir sans pour autant abandonner les ambitions de développement économique en Bretagne.

Retrouvez-nous et venez profiter de notre offre d'essai gratuite de 15 jours sur: http://archannad.eu/membership-account/membership-levels/

Vues : 432

Commenter

Vous devez être membre de Breizhbook pour ajouter des commentaires !

Rejoindre Breizhbook

Commentaire de Frédéric Cotrone le 7 octobre 2014 à 16:35

Comme quoi, l'ego de certaines personnes (en l’occurrence ici le maire de Nantes) va très souvent à l'encontre de l'intérêt général, économique et environnemental. Attention, je ne dis pas que l'autre Premier Ministre (l'actuel) est mieux... !!!

© 2024   Créé par Corentin de Breizhbook.   Sponsorisé par

Badges  |  Signaler un problème  |  Conditions d'utilisation